Dans cette nouvelle catégorie d’articles « Pouce », j’aimerais profiter de l’attitude du philosophe, mêlée à celle des enfants, pour m’arrêter, dire « Pouce ! », faire une pause et penser ce qui nous entoure…
En ce moment, c’est bien sur de « confinement » que je voudrais vous parler (même si ce mot devient presque un tabou).
Bien sur le confinement d’il y a un an, le « premier », le « grand confinement » nous a marqués, heurtés, blessés, limités, et on ne veut pas retrouver ça… Mais ce n’est pas en changeant les mots qu’on change les choses. Étant orthophoniste et philosophe je mesure la complexité des termes employés, et le propre du langage est de permettre à une communauté d’individus partageant cette langue de « savoir de quoi on parle ». Donc parlons de confinement !
Ces nouvelles mesures zones par zone, avec des règles qui relèvent presque de la dentelle, sont bien différentes du confinement de mars 2020 qui a pu être brutal, mais, avec du recul, n’a pas manqué de franchise, ce qui nous a en quelque sorte « soudés » dans l’épreuve.
L’année dernière, dans mon travail d’orthophoniste dans le médico-social, j’ai eu la chance de pouvoir accompagner les familles de mes patients par téléphone, de manière très régulière. Lors de ces entretiens téléphoniques de soutien social et parental, je posais régulièrement la question « comment avez-vous reçu l’annonce du prolongement du confinement, qu’est-ce que cela vous fait vivre ? » La plupart du temps, les mamans que j’avais au bout du fil m’ont répondu :
« … de toute façon c’est pour tout le monde pareil ! »
Cette phrase anodine en apparence me semble pourtant être centrale. Elle ressemble à la prise de secours à laquelle on se rattache sur une paroi d’escalade un peu périlleuse, ou bien au dernier argument que l’on lance dans une joute verbale, mais qui permet de rester en lice…
Cette égalité de traitement est probablement un ressort puissant de résilience, et nous mène tout droit à la fraternité dont nous avons besoin pour faire grandir notre humanité dans ces temps où nous cherchons parfois le sens de cette grande pièce de théâtre qu’est la vie humaine.
J’ai pu entendre dans le ton de ces mamans en charge d’enfants en situation de handicap, devant souvent faire face à leur propre télétravail, à la scolarité de leurs autres enfants, et à la tenue d’un foyer qui permette toutes ces activités, à la fois de la résignation, mais aussi la ressource puisée dans cette égalité de traitement,
cette fraternité partagée au-delà des murs de leurs foyers.
Et je me suis dis que ce « c’est pareil pour tout le monde » pourrait surement nous aider à supporter des contraintes variées… En effet, si les taxations, les placement financiers, les efforts écologiques, les revenus (à travail équivalent, ou avec des écarts raisonnables), etc. étaient « pareil pour tout le monde », il serait probablement plus facile de faire des efforts à titre individuel.
Nos conditions de vie et d’ « accès au bonheur » sont relatives à une époque, un environnement, une culture, et nous connaissons les immenses capacités d’adaptation de l’humain tant qu’il trouve en lui les ressources.
La fraternité ne viendrait-elle pas nourrir cette ressource intérieure, ce sentiment d’appartenance communautaire, si important parmi nos besoins, et souvent oublié à côté des besoins de liberté, de sécurité, de plaisir…
L’impression et la conviction de faire partie de la « même équipe » nous aidera, chacun, à rogner sur notre confort personnel pour le bien commun…